CHAPTER TEN

Tenth Chapter (Version I: First Printed Version, Paris 1740)

Chapitre VII

Des Elemens de la Matiére

§. 117.

1[129] Les Philosophes de tous les tems se sont exercés sur l’origine de la Matiére, & sur ses Elemens. Les Anciens avoient chacun leur sentiment différent sur ce sujet, les uns faisoient l’Eau, l’Element primitif de tous les Corps; les autres, l’Air; d’autres, le Feu; Aristote réünissant tous ces sentimens divers admettoit quatre Elemens des choses, l’Eau, l’Air, la Terre, & le Feu: il croyoit que du mélange de ces quatre prin[130]cipes, qui, selon lui, étoient simples, parce qu’ils n’étoient point resolubles en d’autres mixtes, resultoit tout ce qui nous entoure.

2 §. 118. Descartes, qui malgré l’intervalle du tems qui est entre Aristote & lui, lui a cependant succedé, a fait aussi des Elemens à sa maniére; il a substitué aux quatre principes d’Aristote trois sortes de petits Corps de différente grosseur & différemment figurés, ces petits Corps ou Elemens resultoient, selon lui, des divisions primitives de la Matiére, & formoient par leur combinaison, le Feu, l’Eau, la Terre, l’Air, & tous les Corps qui nous environnent.

3 La plûpart des Philosophes d’aujourd’hui ont abandonné les trois Elemens de Descartes, & conçoivent simplement la Matiére comme une masse uniforme & similaire, sans aucune différence interne; mais dont les petites parties ont des formes & des grandeurs si diversifiées, que la varieté infinie qui régne dans cet Univers peut en resulter. Ainsi, ils ne mettent de différence entre les parties constituantes de l’or, & du papier, par exemple, que celle qui vient de la figure & de l’arrangement de ces parties.

4 Cette opinion qui est très-connuë, ainsi que celle de Descartes, est à peu de chose près celle d’Epicure sur les Atomes que Gassendi à renouvellée de nos jours; car ces parties solides & insécables de la Matiére, qui ne sont distinguées les unes des autres que par leur figure, & leur [131] grandeur, ne différent des Atomes d’Epicure que par le nom.

5 §. 119. M. de Leibnits qui ne perdoit jamais de vûe le principe de la raison suffisante, trouva que ces Atomes ne lui donnoient point la raison de l’étenduë de la Matiére, & cherchant à découvrir cette raison, il crut voir qu’elle ne pouvoit être que dans des parties non étendues, & c’est ce qu’il appelle des Monades.

6 Peu de gens en France connoissent autre chose de cette opinion de M. de Leibnits que le mot des Monades; les Livres du célebre Wolff, dans lesquels il explique avec tant de clarté & d’éloquence le sistême de M. de Leibnits, qui a pris entre ses mains une forme toute nouvelle, ne sont point encore traduits dans notre Langue: je vais donc tâcher de vous faire comprendre les idées de ces deux grands Philosophes sur l’origine de la Matiére; une opinion que la moitié de l’Europe savante a embrassée, mérite bien qu’on s’applique à la connoître.

7 §. 120. Tous les Corps sont étendus en longueur, largeur, & profondeur; or comme rien n’éxiste sans une raison suffisante, il faut que cette étendue ait sa raison suffisante par laquelle on puisse comprendre, comment, & pourquoi elle est possible; car de dire, qu’il y a de l’étenduë, parce qu’il y a de petites parties étenduës, ce n’est rien dire, puisque l’on fera la même que[132]stion sur ces petites parties que sur le tout, & que l’on demandera la raison suffisante de leur étenduë: or comme la raison suffisante oblige d’alleguer quelque chose qui ne soit pas la même que celle dont on demande la raison, puisque sans cela on ne donne point de raison suffisante, & que la question demeure toujours la même; si l’on veut satisfaire à ce principe sur l’origine de l’étenduë, il faut en venir enfin à quelque chose de non-étendu, & qui n’aît point de parties, pour rendre raison de ce qui est étendu, & qui a des parties: or un Etre non-étendu & sans parties, est un Etre simple. Donc les composés, les Etres étendus éxistent, parce qu’il y a des Etres simples.

8 Il faut avoüer que cette conclusion étonne l’imagination, les Etres simples ne sont point de son ressort, on ne peut se les représenter par des Images, & l’Entendement seul peut les concevoir. Les Leibnitiens se servent, pour faire recevoir les Estres simples avec moins de repugnance, d’une comparaison assez juste; si quelqu’un demandoit, disent-ils, comment il se peut faire qu’il y ait des Montres, il ne se contenteroit certainement pas si on lui répondoit; c’est parce qu’il y a des Montres; mais pour donner des raisons suffisantes & qui satisfassent, de la possibilité d’une Montre, il faudroit en venir à des choses qui ne fussent point Montres, c’est-à-dire, aux ressorts, aux rouës, aux pignons, à la chaîne, &c. Ce même raisonne[133]ment a lieu pour l’étenduë; car lorsque l’on dit qu’il y a des Corps étendus parce qu’il y a des atomes, c’est comme si l’on disoit: il y a de l’étenduë, parce qu’il y a de l’étenduë: ce qui est en effet ne rien dire du tout. On ne peut donc trouver la raison suffisante d’un Estre étendu & composé que dans des Estres simples & non étendus, de même que la raison suffisante d’un nombre composé ne peut se trouver que dans un nombre non composé, c’est-à-dire, dans l’unité. Il faut donc convenir, concluent ces Philosophes, qu’il y a des Estres simples, puisqu’il y a des Estres composés.

9 §. 121. Les atomes, ou parties insécables de la Matiere ne peuvent être les Etres simples; car ces parties, quoique phisiquement insécables, sont étenduës, & sont par conséquent dans le même cas que les Corps qu’elles composent: ainsi, le principe de la raison suffisante refuse également aux plus petits Corps comme aux plus grands, cette simplicité qui leur est nécessaire, pour que l’on puisse trouver en eux la raison de l’étenduë de la Matiere.

10 On ne peut dire que, comme il faut enfin parvenir à des choses nécessaires en expliquant l’origine des Estres, il n’y a qu’à poser que les atomes sont nécessairement étendus & indivisibles, & qu’alors on n’aura plus besoin de rechercher la raison de leur étenduë, puisque tous les Philosophes conviennent que ce qui [134] est nécessaire n’a pas besoin de démonstration pourquoi il est; car on ne doit reconnoître pour nécessaire que ce dont le contraire implique contradiction (§. 20.) ce qui est nécessaire a donc besoin d’une raison suffisante qui fasse voir pourquoi il est nécessaire; & cette raison ne peut être que la contradiction qui se trouve dans ce qui lui est opposé. Or comme il n’implique point contradiction que des Estres étendus soient divisibles, on ne peut recevoir l’indivisibilité des atomes comme nécessaire: ainsi il en faut venir à des Estres simples.

11 La volonté du Créateur à laquelle les Atomistes recourent pour rendre raison de l’étenduë de l’atome, ne peut, selon M. de Leibnits, resoudre cette question, parce qu’il ne s’agit pas de sçavoir pourquoi l’étenduë existe, mais comment & pourquoi elle est possible. Or on a vû ci dessus que la volonté de Dieu est la source de l’actualité, mais non pas de la possibilité des choses. Donc, on ne peut y recourir pour rendre raison de la possibilité de l’étenduë.

12 §. 122. M. de Leibnits après avoir établi la nécessité des Estres simples, explique leur nature & leurs proprietés.

13 Les Estres simples n’ayant point de parties; aucune des proprietés qui naissent de la composition ne sçauroit leur convenir; ainsi, les Estres simples n’étant point étendus, sont indivisibles; car n’ayant point plusieurs parties, qui font un, on ne sçauroit les séparer. [135]

14 §. 123. Ils n’ont point de figure, car la figure est la limitation de l’étenduë; or ces Estres simples n’étant point étendus, ils ne peuvent avoir de figure: par la même raison, ils n’ont point de grandeur, & ils ne remplissent point d’espace, & n’ont point de mouvement interne; car toutes les propriétés conviennent au composé, & découlent de la composition: ainsi, les Estres simples sont tous différens des Estres composés, & ils ne peuvent être ni vûs, ni touchés, ni representés à l’imagination par aucune image sensible.

15 §. 124. Un Estre simple ne peut être produit par un Estre composé, car tout ce qui peut provenir d’un composé, naît, ou d’une nouvelle association, ou de la dissociation de ses parties; or l’association ne peut produire qu’un Estre composé, & de la dissociation, quand elle est poussée à son dernier période, il ne peut venir que des Estres simples qui existoient déja dans le composé: donc ils n’ont pas été produits par cette dissociation: donc un Estre simple ne peut venir d’un Estre composé.

16 Il ne peut venir non plus d’un autre Estre simple, car l’Estre simple étant indivisible, & n’ayant point de parties qu’on puisse séparer, rien ne peut se détacher de lui. Ainsi, un Estre simple ne sçauroit naître d’un Estre simple; or puisque les Estres simples ne peuvent provenir [136] des Estres composés, ni d’autres Estres simples; il s’ensuit que la raison des Estres doit être dans l’Estre nécessaire, c’est-à-dire, dans Dieu. Et on ne peut dire que la raison des atomes ou parties insécables de la Matiere pourroit être dans Dieu comme celle des Estres simples; Dieu n’a pû créer l’étenduë sans créer auparavant les Estres simples; car il faut que les parties du composé existent avant le composé, mais les parties n’étant plus résolubles en d’autres, leur raison premiere doit se trouver dans le Créateur.

17 §. 125. Les Estres simples étant l’origine des Estres composés, il faut que l’on trouve dans les Estres simples la raison suffisante de tout ce qui se trouve dans les Estres composés; les Estres simples doivent donc avoir des déterminations intrinseques, par lesquelles on puisse comprendre pourquoi les composés qui en résultent, sont plutôt tels qu’ils sont, que tout autrement, c’est-à-dire, pourquoi ils ont tels & tels attributs, telles & telles proprietés, &c. Or comme vous avez vû ci-dessus qu’il n’y a point d’Estres semblables dans la nature, tous les Estres simples doivent être dissemblables & contenir en eux des différences, qui empêchent qu’on ne puisse mettre l’un à la place de l’autre dans un composé, sans changer sa déterminations, puisque si ces Estres simples n’étoient pas tous dissemblables, les composés qui en résultent ne le pourroient point être non plus. [137]

18 §. 126. On observe dans les composés un changement perpétuel; rien ne demeure dans l’état où il est; tout tend au changement dans la nature; or puisque la raison premiere de ce qui arrive dans les composés se doit enfin trouver dans les simples, dont les composés resultent, il se doit trouver dans les Etres simples un principe d’action capable de produire ces changemens perpétuels, & par lequel on puisse comprendre pourquoi les changemens se font en un tel tems, plutôt que dans tout autre, & d’une telle maniere, plutôt que de toute autre.

19 Le principe qui contient la raison suffisante de l’actualité d’une action quelle qu’elle soit, s’appelle force; car la simple puissance ou faculté d’agir n’est dans les Etres qu’une possibilité d’action ou de passion, à laquelle il faut une raison suffisante de son actualité. C’est ainsi que l’on dit qu’un animal a la faculté de marcher, un arc, celle de chasser une fléche, une montre, celle de marquer les heures, parce qu’on peut expliquer par la structure de l’animal, de l’arc & de la montre, comment & pourquoi ces effets sont possibles, mais il ne suit point de là que ces effets soient actuels; car si cela étoit, l’animal marcheroit toujours, & la montre indiqueroit toujours les heures, mais c’est ce qui n’arrive pas. Il faut donc admettre entre cette possibilité une raison suffisante de l’actualité, c’est-à-dire, une force qui mette en oeuvre cette puissance que l’Estre a d’agir. Or la raison suffi[138]sante de tout ce qui arrive aux composés devant se trouver à la fin dans les Etres simples, il s’ensuit que les Etres simples ont cette force, qui consiste dans une tendance continuelle à l’action, & cette tendance a toujours son effet quand il n’y a point de raison suffisante qui l’empêche d’agir, c’est-à-dire, quand il n’y a point de resistance; car on doit appeller résistance, ce qui contient la raison suffisante pourquoi une action ne devient point actuelle, quoique la raison de son actualité subsiste.

20 Les Etres simples sont donc doüés d’une force, quelle qu’elle puisse être, par l’énergie de laquelle ils tendent à agir, & agissent en effet dès qu’il n’y a point de résistance. Or comme l’experience prouve que la force des Estres simples se déploye continuellement puisqu’elle produit des changemens sensibles à chaque instant dans les composés, il s’ensuit que chaque Estre simple est en vertu de sa nature & par sa force interne, dans un mouvement qui produit en lui des changemens perpetuels & une succession continuë; & que son état interne & la suite des successions qu’il éprouve sont différens de l’état interne, & des successions qu’éprouve tout autre Etre simple dans l’Univers entier.

21 §. 127. Les composés durent malgré les changemens qu’ils subissent, la matiere demeure la même pendant qu’elle reçoit différentes [139] formes, notre Corps, ni celui des Planetes, ni l’air, ni rien de ce qui nous entoure ne s’anéantit; cependant l’état de ces Etres change à tout moment: il faut donc que les Etres simples dont les Etres composés résultent, durent c’est-à-dire, qu’ils ayent des déterminations constantes & invariables, pendant qu’ils en ont d’autres qui varient continuellement; car si les simples n’étoient pas durables par leur nature, les composés ne pourroient durer: les Etres simples sont donc de véritables substances, c’est-à-dire, des Etres durables & susceptibles des modifications que leur force Interne produit, (§. 52.)

22 Rien ne sçauroit arrêter cette force interne des Etres simples, ni changer les effets qui en sont une suite, parce qu’aucun agent naturel ne peut ni briser, ni détruire les Etres simples.

23 §. 128. On voit par là que les véritables Substances (c’est-à-dire) les Etres simples sont actives, puisqu’elles portent en elles le principe de leurs changemens, c’est-à-dire, cette force qui leur est essentielle, qui ne les quitte jamais, & qui ne peut s’éteindre: & l’on comprend ce que M. de Leibnits entendoit lorsqu’il disoit que le véritable caractere de la Substance est d’agir, qu’elle se distingue des accidens par l’action, & qu’il est impossible de la concevoir sans force.

24 J’ai dit ci-dessus que suivant le sentiment de [140] M. de Leibnits, chaque Monade, ou Etre simple (car c’est la même chose) contient une suite de changemens qui est différente de la suite des changemens, de tout autre Etre simple, ce qui est une suite nécessaire du principe des indiscernables. Nous en avons un exemple dans nos ames, car personne ne doute que la suite des idées d’une ame ne soit différente de la suite des idées de toutes les autres ames qui existent.

25 §. 129. Les différens états d’un Etre simple dépendent les uns des autres; car un tel état successif n’étant point plus nécessaire qu’un autre, il faut qu’il y ait une raison suffisante pourquoi un tel état est actuel, & pourquoi plûtôt en tel tems qu’en tout autre: or cette raison ne peut se trouver que dans l’état qui a précedé, & la raison de celui-ci sera dans l’état antécedent à lui, & ainsi de suite jusqu’au premier. Ce premier état, qui n’en suppose point d’autre antécedent à lui, a dépendu de Dieu; mais tous les états conséquens sont liés entre eux, ensorte que du premier découle le dernier qui y étoit contenu, & qui doit être tel, parce que le premier a été ainsi & non pas autrement: de même que l’état actuel d’un Horloge dépend de l’état précédent, celui là d’un autre, & ainsi de suite, jusqu’au premier qui a dépendu de la façon dont l’ouvrier a arrangé les rouës; & c’est ainsi que la 47. proposition d’Euclide découle de la premiere, & y est contenuë. [141]

26 §. 130. Tout est lié dans le monde; chaque Etre a un rapport à tous les Etres qui coéxistent avec lui, & à tous ceux qui l’ont précedé, & qui doivent le suivre: nous sentons nous-même à tout moment que nous dépendons des Corps qui nous environnent; qu’on nous ôte la nourriture, l’air, un certain degré de chaleur, nous périssons, nous ne pouvons plus vivre; toute la Terre dépend de l’influence du Soleil, & elle ne sçauroit se conserver, ni végeter sans son secours. Il en est de même de tous les autres Corps; car quoique nous ne voyions pas toujours distinctement leur liaison mutuelle, nous ne pouvons cependant par le principe de la raison suffisante & par l’analogie, douter qu’il n’y ait une, & que cet Univers ne fasse un tout, un entier & une seule machine dont toutes les parties se rapportent les unes aux autres, & sont tellement liées ensemble, qu’elles conspirent toutes à une même fin.

27 §. 131. Les raisons primitives de tout ce qui arrive dans les Corps, devant se trouver enfin dans les Elemens dont ils sont composés, il s’ensuit que la raison primitive de la liaison des Corps entre eux en tant qu’ils coéxistent, & qu’ils se succedent, se trouve dans les Estres simples: la liaison des parties du Monde dépend donc de la liaison des Elemens, qui en est le fondement, & la premiere origine. Ainsi, l’état de [142] chaque Element renferme une relation à l’état présent de l’Univers entier, & à tous les états qui naîtront de l’état présent, de même que dans une Machine bien faite, la moindre partie a une relation à toutes les autres: car l’état d’un Element quelconque A étant déterminé, l’harmonie & l’ordre demandent que l’état de ses voisins B C D, &c. soient aussi déterminés d’une telle maniére, plûtôt que de toute autre, pour conspirer avec l’état du premier; & comme la même raison continuë pour tous les états des Elemens, tous les états futurs des Elemens auront aussi une relation à l’état présent qui doit coéxister avec eux, aux états passés dont cet état présent découle, & aux états qui le suivront, & dont il est la cause. Ainsi, on peut dire que dans le sistême de M. de Leibnits, c’est un problême Métaphisico-Géometrique, l’état d’un Element étant donné, en déterminer l’état passé, présent, & futur de tout l’Univers: la solution de ce problême est reservée à l’éternel Géometre qui le resout à tout moment, en ce qu’il voit distinctement la relation de l’état de chaque Etre simple à tous les états passés, présens, & futurs de tous les autres Etres de l’Univers: mais il sera toujours impossible aux Etres finis d’avoir une idée distincte de cette relation infinie, que toutes les choses qui éxistent ont entre elles, parce qu’alors ils deviendroient Dieu.

28 §. 132. Notre Ame se représente à la vérit[143]l’Univers entier, mais c’est d’une maniére confuse, au lieu que Dieu le voit d’une maniére si distincte, qu’aucun des rapports qui y entrent ne lui échappent. C’est encore un des sentimens de M. de Leibnits, qui a le plus besoin d’être éclairci & d’être sauvé du ridicule, dont on pourroit le charger, que cette représentation de l’Univers entier, & de tous ses changemens, qu’il prétend être un attribut de notre Ame.

29 On sait, & tous les Philosophes conviennent que le mouvement se propage dans le plein à toutes les distances, la moindre pierre jettée dans l’Océan trouble l’équilibre de cette masse d’eau immense, & y forme des anneaux dont on ne discerne point distinctement la fin. Figurons nous, par exemple, un batteau qui flotte sur la Mer, & qu’on y jette à des distances différentes de ce batteau, des pierres de différente grosseur, on s’apperçoit que chaque pierre fait naître des anneaux, qui en forme d’ondes se propageront plus ou moins fort, à proportion qu’elles viennent de plus loin, & que la cause qui les a produites étoit plus puissante. Ainsi, ce bateau recevra successivement des impressions de toutes les pierres, dont chacune est telle qu’on en pourroit déterminer la cause, & la distance: or nous sommes dans le même cas que ce batteau, notre Corps nage dans un fluide infini, & il vient des ondes le frapper de toutes parts, lesquelles portent avec elles le caractére de leur [144] origine; lorsqu’une impression dans les organes de nos sens est forte, & qu’elle excite en nous un mouvement violent, parce que l’objet qui en est la cause est proche, nous l’apperçevons & nous en avons une idée fort claire; à mesure que l’objet qui cause la sentation s’éloigne, l’impression qu’il fait sur les organes de nos sens devient moins forte, & la clarté de l’idée qu’elle excite en nous suit cette dégradation, & diminuë à proportion; car par la loi de continuité, la clarté de l’idée doit suivre la force de l’impression. Ainsi, quand l’objet est fort loin, & qu’il ne peut faire d’impression sensible sur nos sens, l’idée doit aussi devenir insensible, c’est-à-dire, doit former une représentation obscure; or les impressions que les objets font sur nous, continuent à quelque distance qu’ils puissent être placés, parce que dans le plein tout mouvement doit produire des ondes à l’infini, comme cette pierre qu’on jette dans l’Océan, dont je viens de parler, & les ondes propagées & dilatées à l’infini doivent nécessairement venir jusqu’à nous; & par conséquent, il se doit faire dans notre ame une représentation relative au mouvement que nos organes ont éprouvé. Car si à une certaine distance les représentations que les objects excitent dans notre ame, venoient à cesser, quoique les impressions qu’ils font sur nos sens continuassent, il se feroit un saut dans la Nature, ce qui seroit contraire au principe de la [145] raison suffisante (§. 13.) car il n’y auroit point de raison, pourquoi la clarté d’une idée auroit diminué par gradation, & suivi la proportion des impressions jusqu’à un certain point, & qu’à ce point elle vint à finir comme par un saut, quoique la raison pour laquelle elle devroit continuer subsistât toujours. Ainsi, dès qu’on admet le principe de la raison suffisante, & le plein qui en est une suite, on est obligé de convenir que nous recevons des impressions de tous les mouvemens qui arrivent dans l’Univers, & que notre ame en a des représentations obscures, à cause de la liaison constante qui est entre les impressions du Corps & les représentations de l’ame. Nous ne pouvons avoir à la vérité une représentation claire que des changemens les plus marqués, & qui affectent nos organes avec une certaine force; mais toutes ces représentations éxistent, quoique notre ame ne les apperçoive point, à cause de leur foiblesse & de leur multiplicité infinie, qui fait qu’il est impossible de les distinguer, & que par conséquent, elles n’éxcitent en nous que des représentations obscures. Qu’une infinité de représentations obscures accompagnent nos idées les plus claires, c’est ce dont nous ne pouvons disconvenir, si nous faisons un peu d’attention sur nous mêmes. J’ai une idée toute claire, par exemple, de ce papier, sur lequel j’écris, & de la Plume dont je me sers: cependant, combien de représentations obscures sont enveloppées et cachées, pour ain[146]si dire, dans cette idée claire; car il y a une infinité de choses dans la tissure de ce papier, dans l’arrangement des fibres qui le compose, dans la différence & la ressemblance de ces fibres que je ne distingue point, & dont j’ai cependant une représentation obscure; car les fibres, leurs différences, & leur arrangement subsistant, il n’y a aucune raison pourquoi elles ne causeroient pas des impressions dans mes organes, & par conséquent des représentations dans mon Ame: mais ces impressions étant trop foibles & trop composées, je ne les distingue point, & il en naît dans mon Ame des représentations obscures. Ainsi, la représentation totale qui resulte du tout de ce papier est claire; mais les représentations partiales sont obscures. Il est aisé de voir par-là pourquoi dans le ventre de nos meres, nous sommes dans un état d’idées toutes obscures, c’est que notre Corps n’étant point encore développé, nos membres & nos organes sont affaissés & concentrés presque dans un point; par conséquent il est impossible que l’animal ne soit également affecté par tout de la même impression. Ainsi, le moindre mouvement ébranle l’animal entier si fort, qu’il ne sauroit distinguer une impression d’une autre, ni par conséquent se former d’idées distinctes; au lieu que quand nous sommes sortis des envelopes de l’uterus, notre Corps est tellement disposé, que le mouvement des raisons de lumiére, par exemple, ne peut point ébranler les nerfs acoustiques, ni les sons [147] le nerf optique, & embrouiller par-là des idées fort différentes, qui doivent être conçûes & senties séparement pour qu’elles puissent être distinctes.

30 §. 133. Cette liaison de notre Ame avec l’Univers entiers vient donc de l’union des Elemens entre eux, & des rapports qu’ils ont tous les uns avec les autres, & ces rapports naissent de leur dissemblance; car cette dissemblance fait que chaque Element par son essence & par ses déterminations intrinseques, éxige la coéxistance d’un tel Element auprès de lui plûtôt que de tout autre, & l’on ne pourroit ôter un Element de sa place pour lui en substituer un autre, & conserver cependant la même suite de choses; un tel changement changeroit tout l’Univers, & il s’en formeroit un Univers nouveau: d’où l’on voit que l’on trouve dans la dissemblance des Elemens, pourquoi cet Univers est tel qu’il est plûtôt que tout autre. C’est encore par cette dissemblance que l’on peut comprendre comment des Etres non étendus peuvent former des Etres étendus; car les Elemens éxistent tous nécessairement les uns hors des autres (puisque l’un ne peut jamais être l’autre,) & étant tous, comme on vient de le voir, unis & liés ensemble, il en resulte un assemblage de plusieurs Etres divers, qui éxistent tous les uns hors des autres, & qui par leur liaison font un tout; mais j’ai fait voir que nous ne pouvons nous représenter l’étenduë que comme l’assemblage de plusieurs [148] choses diverses coéxistantes, & qui éxistent les unes hors des autres (§. 77.): donc, conluënt les Leibnitiens, un agrégat d’Etres simples doit être étendu. Ainsi, de l’union Métaphisique des Elemens entr’eux découle l’union Méchanique des Corps que nous voyons; car toute la Méchanique qui tombe sous nos sens dérive à la fin, & en remontant à la source premiere, de principes supérieurs & Metaphisiques.

31 §. 134. Les Composés ne peuvent subsister sans les simples, ni recevoir aucun changement qui ne soit fondé dans les Elemens; ainsi les Composés ne sont point des Substances par eux mêmes, mais des assemblages de Substances ou d’Etres simples. Car dans l’Etre composé, il n’y a rien de Substantiel que les Elemens; tout le reste, comme la grandeur, la figure des parties, leur situation entre elles, les qualités Physiques de la Matiére, comme la dureté, la ductilité, la meabilité, &c. qui constituent le Composé, ne sont que des Modes; comme dans une Montre, par exemple, la figure des Roues, leur combinaison, la qualité du ressort, la duretés des parties, &c. constituent la Montre: cependant, on voit évidemment que toutes ces choses ne sont que des Modes, qui peuvent varier sans que la matiére de la Montre périsse; & par conséquent il ne périt rien de substantiel, quoiqu’un composé cesse, & qu’il s’en forme un autre par la différente combinaison de ses par[149]ties, puisque les Elemens continuent toujours de subsister, & de durer quelque séparation qui puisse arriver aux parties qui font les Composés. Cependant, l’étendue doit nous paroître une Substance, car nous voyons qu’elle dure, & qu’elle peut être modifiée (§. 52.); mais si nous examinons cette idée avec les yeux de l’Entendement, nous serons obligés de reconnoître qu’elle n’est qu’un Phenoméne, une abstraction de plusieurs choses réelles, par la confusion desquelles nous nous formons cette idée d’étendue; c’est de cette confusion que naissent presque tous les objets qui tombent sous nos sens, & dont les réalités sont souvent infiniment différentes des apparences (§. 53.) Ainsi, si nous pouvions voir distinctement tout ce qui compose l’étendue, cette apparence d’étendue, qui tombe sous nos sens, disparoîtroit, & notre Ame n’appercevroit que des Etres simples éxistans les uns hors des autres, de même que si nous distinguons toutes les petites portions de matiére differemment mues, qui composent un portrait, ce portrait qui n’est qu’un Phenoméne disparoîtroit pour nous. Ainsi, la même confusion, qui est dans mes organes & qui fait que de la ressemblance d’un visage humain resulte l’assemblage de plusieurs portions de matiére différemment mues, dont aucune n’a de rapport au Phenoméne, qui en resulte pour moi, cette même confusion, dis-je, fait que le Phenoméne de l’étendue resulte pour nous de l’assemblage [150] des Etres simples & de leurs différences internes; mais comme il est impossible que nous nous représentions l’état interne de tous les Etres simples, duquel, cependant, le Phenoméne de l’étendue dépend, toute perception des réalités nous doit échapper par notre nature; & il ne nous reste des idées confuses que nous avons de chacun de ces Etres simples, qu’une idée de plusieurs choses coéxistantes, & liées ensemble, sans que nous sachions distinctement comment elles sont liées, & c’est cette idée confuse qui fait naître le Phenoméne de l’étendue.

32 §. 135. La repugnance que l’on a à concevoir comment des Etres simples & non étendus peuvent par leur assemblage composer des Etres etendus, n’est pas une raison pour les rejetter: cette révolte de l’imagination contre les Etres simples, vient vraisemblablement de l’habitude ou nous sommes de nous représenter nos idées sous des images sensibles, qui ne peuvent ici nous aider.

33 Dans les choses dont on ne peut se faire d’images sensibles, & qu’on ne peut se représenter par des caractéres, il faut tâcher d’y suppléer en ne perdant jamais les principes incontestables de vûe, & en tirant des conclusions par des conséquences liées entr’elles, sans faire jamais aucun saut dans nos raisonnemens.

34 Il en seroit des vérités Géometriques comme des Etres simples, si on n’avoit pas inventé des signes pour les représenter à l’imagina[151]tion, cependant ces vérités n’en seroient pas moins sûres, peut-être quelques jours trouvera-t’on un calcul pour les vérités Metaphysiques, par le moyen duquel par la seule substitution des caractéres, on parviendra à des vérités comme dans l’Algebre. M. de Leibnits croyoit l’avoir trouvé; mais par malheur il est mort sans communiquer sur cela ses idées, qui du moins nous auroient mis sur la voie, si elles n’avoient pas donné tout ce que le nom d’un aussi grand homme promettoit.

35 §. 136. Il est fâcheux sans doute que tous les gens qui pensent ne soient pas d’accord sur les premiers principes des choses, il sembleroit que le droit que la vérité a sur notre assentiment devroit s’étendre sur toutes les notions & sur tous les tems. Cependant, combien de vérités ont été combattues des siécles entiers avant d’être admises; tel a été, par exemple, le véritable sistême du Monde, & de nos jours les forces vives. Il ne m’appartient pas de décider si les Monades de M. de Leibnits sont dans le même cas: mais soit qu’on les admette, ou qu’on les refute, nos recherches sur la nature des choses n’en seront pas moins sûres; car nous ne parviendrons jamais dans nos expériences jusqu’à ces premiers Elemens qui composent les Corps, & les Atomes physiques (§.172.), quoique composés encore d’Etres simples, sont plus que suffisans, pour exercer le desir que nous avons de connoître.

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  • I: Marginal summary: Quels étoient selon les anciens Philosophes les principes des choses.
  • I: Marginal summary: Idée de Descartes sur les Elemens de la matiére.
  • J: prémières division
  • I: Marginal summary: Opinion nouvelle sur les Elemens, qui s’est formée de celle de Descartes.
  • I: Marginal summary: Cette opinion est à peu près celle d’Epicure sur les Atomes.
  • J: petites parties
  • I: Marginal summary: Le principe de la raison suffisante montre que les Atomes sont inadmissibles.
  • J: de
  • I: Marginal summary: Exposition du sistême de M. de Leibnits sur les Monades ou Elemens de la matiére.
  • J: dans le même état
  • J: A new paragraph begins here.
  • J: supposées physiquement
  • I: Marginal summary: Les Atomes ne peuvent être les Etres simples dont la Matiere est composée.
  • I: cas, quant à l’étendue, que
  • J: chercher
  • J: est
  • J: vous avez vu ci-dessus (§. 27.)
  • I: Marginal summary: Les Estres simples ou Monades n’ont point de parties.
  • J: peut
  • I: Marginal summary: Ni de figure.
  • Not in J
  • J: sont une suite
  • I: Marginal summary: La raison suffisante des Estres simples est dans Dieu.
  • J: raison immédiate de ces Etres
  • H: Estres simples
  • J: raison immédiate
  • J: est aussi
  • J: car les atomes étant résolubles, ils ont la raison suffisante de leur composition dans les parties qui les composent, car les parties sont possibles, quand même on supposeroit l’atome indivisible: or Dieu n’a pu créer les atomes sans créer auparavant les parties dont ils sont composés, donc la raison immédiate de l’atome n’est pas dans Dieu, mais les Etres simples n’étant formés par aucun assemblage, & n’ayant aucunes parties, Dieu n’a pu rien créer de prémier à ces Etres pour les en former, ainsi la raison immédiate de l’éxistence des Etres simples doit être dans le Créateur.
  • H: car Dieu
  • H: puisqu’il
  • H: Ces
  • I: Marginal summary: Les Estres simples contiennent la raison suffisante de tout ce qui se trouve dans les Estres composés.
  • J: internes
  • J: ci-dessus (§. 12.)
  • J: ses
  • I: Marginal summary: Les Etres simples ont un principe d’action & c’est ce qu’on appelle Force.
  • J: il doit y avoir
  • J: ces
  • J: outre
  • J: faculté d’agir qui est dans l’être.
  • I: Marginal summary: Les Etres simples sont dans un mouvement continuel.
  • J: & comme vous venez de voir (§ 125.) que les Etres simples sont tous dissemblables, la suite des successions qu’éprouve un Etre simple quelconque, est différente de celle qu’éprouve tout autre Etre simple. Nous en avons un exemple inconstestable dans nos Ames, car personne ne doute que la suite des idées d’une Ame quelconque, ne soit différente de la suite des idées de toutes les autres Ames qui existent, ainsi dans l’Univers entier il n’y a pas deux Etres simples dont l’état interne soit le même, car la suite des successions, que ces Etres éprouvent, est ce qui constitue leur état interne.
  • J: subsiste toujours, quoiqu’elle reçoive
  • I: Marginal summary: Il n’y a de véritables substances que les Etres simples.
  • J: agir sur
  • J: Vous voyez
  • J: , qui sont les Etres simples,
  • Not in J
  • J: nait
  • J: d’une
  • J: suit
  • I: Marginal summary: Tout est lié l’un à l’autre dans cet Univers.
  • J: nous-mêmes
  • Not in J
  • J: l’état présent
  • J: présent & à tous ceux qui ont précédé,
  • J: l’état déterminé du prémier A
  • Not in J
  • J: de tous les
  • J: ont
  • J: est une suite
  • J: dans le systême de Mr. de Leibnits on peut proposer ce problême:
  • J: est, à la vérité, réservée
  • J: Etres simples
  • J: quoiqu’il soit
  • J: ces rélations infinies
  • Not in J
  • J: Dieu, ces rélations infinies n’en éxistent pas moins, & c’est beaucoup pour des êtres aussi bornés que nous, d’avoir pu les apercevoir.
  • I: Marginal summary: Notre ame a des représentations obscures de tout ce qui arrive dans tout l’Univers.
  • Not in J
  • J: Not in J
  • J: dans laquelle il prétend que l’essence de notre ame consiste.
  • Not in J
  • J: qui se propagent
  • J: ces
  • J: & chacune de ces impressions sera telle qu’on en pourra déterminer la grandeur de ces pierres, & leur
  • J: Here a new paragraph and sentence begin
  • J: sensation
  • J: ces
  • J: des représentations rélatives aux mouvemens que nos organes ont éprouvés
  • J: contraire à la loi de continuité, &
  • J: une idée dont la clarté
  • J: impressions extérieures
  • J: viendroit à cesser tout d’un coup à ce point,
  • J: cause qui l’a excitée
  • J: Here in H a note calls for a paragraph break, and in J a new paragraph begins here.
  • Not in H and J
  • H: composent
  • H: ces
  • Not in J
  • J: partiales qui la composent
  • J: & que par conséquent
  • J: rayons
  • Not in J
  • J: La
  • J: entier
  • J: sa force & par ses déterminations constantes & internes
  • J: & réciproquement, d’ou nait l’union des Elémens entre’eux, & cette union est le fondement de celle des parties de la matière. Ainsi l’union méchanique des Corps que nous voyons, nait de l’union métaphysique des Elémens, d’où il suit qu’on ne
  • J: ainsi
  • J: Here a new paragraph begins
  • J: étendus; & que l’on peut voir comment la raison suffisante de l’étendue de la matière se trouve dans les êtres simples, car
  • Not in J
  • I: Marginal summary: Tout Etre composé n’est point une substance, mais un aggrégat de substances, c’est-à-dire, d’Etres simples.
  • J: matière qui le compose
  • H and J:malléabilité
  • J: quoique la
  • Read: dureté
  • J: composent
  • Not in J
  • J: parties
  • I: Marginal summary: Comment l’étenduë peut résulter de l’assemblage des Etres simples.
  • H: que la H and J
  • Not in H and J
  • H and J: de l’assemblage
  • J: dépend, il est impossible que nous voyions jamais distinctement comment ce phénomène résulte de l’union & de la diversité des Etres simples, & nous devons nous contenter de nous être prouvé la nécessité de ces Etres, & de voir par des exemples sensibles, tels que ceux que je viens de vous donner, combien la confusion qui regne dans nos sensations change pour nous les objets, & que par conséquent
  • J: nous échaper
  • J: doit rester
  • J: naître pour nous
  • J: l’étendue de la matière
  • I: Marginal summary: Pourquoi les Etres simples révoltent tant l’imagination.
  • J: difficulté
  • J: & la répugnance que l’on à a admettre les Etres simples ne sont pas
  • Not in J
  • J: de ces principes des conclusions légitimes
  • J: ses
  • J: quelque jour
  • J: à prouver les
  • J: nations
  • Not in J

How to cite:

CHAPTER TEN, Version I. In: Du Châtelet, Émilie: Institutions de physique. The Paris Manuscript BnF Fr. 12265. A Critical and Historical Online Edition.
Edited by Ruth E. Hagengruber, Hanns-Peter Neumann, Aaron Wells, Pedro Pricladnitzky, with collaboration of Jil Muller. Center for the History of Women Philosophers and Scientists, Paderborn University, Paderborn. Version 1.0, April 4th 2024, URL: https://historyofwomenphilosophers.org/dcpm/documents/view/chapter_ten/version/i/rev/1.0